Le Monstre de l’Anxiété

2020-02-04
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Reflet du quotidien. Quand on va mieux et qu’on y repense, c’est comme de s’observer au travers de la surface de l’eau sur laquelle s’abattrait une tempête. Cette impression que de l’autre côté de ce miroir se trouverait la sérénité, le bonheur. Protégé de la souffrance mentale par cette masse d’eau. Dans les abysses, le calme est presque absolu.

Réalité difforme. Les émotions culminent, tout devient monstrueux, en commençant par soi. Le Monstre est né. Est-il seulement possible de justifier ce qui nous apparaît alors comme un simple « coup de sang » ? Une émotion peut-elle être excusée ? Ce Monstre, quand il sommeille, c’est tout d’abord beaucoup de questions. Elles sont là comme pour rappeler un mauvais présage : Il se nourrit du manque d’estime personnelle. Cette peur permanente de ne pas réussir à trouver valeur aux yeux des autres, de devoir justifier ce qu’on est, de douter des autres. Je pense donc je souffre.

Monde à l’envers. Il s’y cache, derrière ce reflet. Il y fait miroiter un lendemain meilleur, jusqu’à l’obsession : si ce qui me contrarie disparaît maintenant, tout ira mieux. La goutte d’eau fait l’effet d’une cascade, le Monstre se rassasie. Le mal se mue en égoïsme, tout ce qui peut aider à le résorber est justifié, l’empathie n’est plus qu’un mot. L’amour, un bouclier et sa réciprocité, une arme.

Catastrophe émotionnelle. Le Monstre ne s’arrête pas là ; s’Il trouve dans l’anxiété un hôte parfait, ses victimes n’en restent pas moins nombreuses et l’amour est son vecteur. Ce sentiment suffit-il à justifier le tsunami qui s’abat sur nos proches ? Qu’importe, il est trop tard, Il se répand. Pour celui qui se montrerait trop inattentif, il vient un moment où il n’est plus possible de se convaincre que tout va bien. Le Monstre est là . Son emprise est totale : sur l’être, sur les liens, sur les sentiments, sur le quotidien.

Boucle. On manque de confiance en soi parce qu’on souffre, on souffre parce qu’on manque de confiance en soi. Cette équivalence engendre une inlassable répétition et le Monstre devient chaque fois plus grand. Tandis que les leviers se multiplient, le sentiment demeure : il faut apaiser la souffrance. Lui donner ce qu’il désire. Alors peut-être le Monstre a-t-il déjà disparu ? Peut-être n’a-t-il jamais existé ? Qu’importe, l’hôte perpétue ce pourquoi il a été conditionné : se soulager. Une addiction au bonheur qui s’est depuis longtemps transformée en addiction à la tristesse, au mal-être, à la mort.

Vitre sans teint. L’hôte est devenu Monstre, son reflet est parfait. De l’autre côté, ses victimes. Impuissants observateurs de cette mutation, ils ne peuvent que subir jusqu’à ce que la vitre se brise. Telle est la réalité, il n’en existe pas de meilleure que celle-ci. Le Monstre n’est que la projection de soi sur les autres ; si on le réalise, c’est parce que les autres ont disparu.

Quant à Lui, peut-être est-il toujours là, invisible, rendu muet les abysses de la solitude.

Pango

L'auteur de pensées
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