Summer Depression

2020-01-28
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Je ne suis ni critique de musique, ni fin psychologue. Je ne ressens pas le besoin d’analyser les mélodies ou les paroles pour les lier à mes ressentis ou à mes goûts. C’est pourquoi je me contente de partager ces musiques sans plus de mise en valeur. Cependant, je pense qu’elles peuvent accompagner mes réflexions, après tout c’est la source principale de mes élans créatifs, c’est ce qui communique le mieux avec ma sensibilité.

Cette fois-ci, il sera bien question de dépression. Je pourrai m’attarder sur les phénomènes psychologiques, détailler les symptômes, les degrés de manifestation, sourcer mes propos mais je n’ai actuellement pas envie de mener ce travail de fond. Je ne sais même pas ce qui me concerne ou non par rapport à toutes ces études qui ont pu être menées. Il n’y aura pas non plus de message positif, pas de « ça finit par s’arranger », juste ma réalité. Pour le moment je vais me contenter de l’évidence et je vais parler de moi.

Ça a tout d’abord été une violence profonde. La volonté de mourir, celle de me faire du mal. Certainement celle d’en faire à mes proches, une détresse. Toutes ces émotions plongées dans un miasme nauséabond. Tout devient si incontrôlable, le quotidien, les sensations, les rêves, les pensées, la vie. Comme de se noyer dans une marée noire. C’était juste le début. Peut-être le point culminant d’un grand huit, celui qui nous prépare au premier plongeon, le plus grand, qui annonce une série de turbulences. Est-ce qu’il s’arrête ? Est-ce qu’on peut descendre ? Est-ce qu’il finira par dérailler ? Ce grand huit là, il est plongé dans le noir et on ne le réalise qu’une fois en haut. J’adore les parcs d’attraction.

Est-ce que cette première descente est passée ? Je n’en sais rien, ce que je sais c’est que ça avance et que je ne contrôle finalement pas grand chose. Ça s’est dans en premier temps mue en une perte de sens. Une sorte de « qui suis-je ? » mais bien plus vague, bien plus profond. Qu’importe la place qu’on a dans l’univers, qu’est-ce qu’on doit être à ce moment précis ? Est-ce qu’on doit être quelque chose ? Ces questions que j’arrive à mettre en forme aujourd’hui mais qui à ce moment étaient assourdies par le mal-être. Alors je continue à me faire du mal. Je ne me nourris plus, je ne dors plus, je ne parle plus, sauf pour faire du mal. Aux autres et à moi. Je m’en rappelle, la raison reprenait parfois le dessus. Aussi futile qu’éphémère, rapidement emportée par les flots violents de mes idées noires.

La moindre émotion est exacerbée. Une petite satisfaction devient la source d’une joie extrême, une simple contrariété apparaît comme une sentence finale. La bonne raison d’en finir. Alors on cherche, on s’accroche. J’avais une conviction : dans mon esprit, point de salut. Trop impur, trop malsain, trop cassé. La beauté est dans mon passé, elle est chez les autres, il n’y a rien à chercher chez moi. Finalement, ironie, on se transforme en épouvantail. Convaincu d’être malade et contagieux, un poison pour les autres.

Quand est-ce que ça s’arrête ? Est-ce que ça s’est arrêté ? Si quelque chose a changé, qu’est-ce qui a changé ? Le plus décisif a sûrement été de m’ouvrir. C’était me donner un premier élan, c’était montrer aux gens que ça n’allait pas, accepter que j’étais moche. Quelle ne fut pas leur surprise. Tout le monde « voit que quelque chose ne va pas » mais personne « n’aurait pensé ». Si quelqu’un me frappe, je reste persuadé que la faute réside chez moi et non chez l’autre, parce qu’après tout qu’est-ce que je vaux ? Alors ces gens qui m’entourent, ces gens qui ont disparu, je ne leur en veux pour rien. Je pense que c’est important de le dire, c’est une des rares choses qui me procurent de la satisfaction : savoir qu’à aucun moment je n’ai projeté ma négativité sur l’autre. Je suis seul et unique responsable de ma vie. M’ouvrir, c’était accepter de perdre. Perdre une forme de confiance implicite, perdre en simplicité dans les relations, voire perdre des relations entières. Supporter le regarde des autres, leurs pensées. C’était faire le choix de tirer un trait sur l’anxiété. La conserver, c’est jeter du sel sur des plaies béantes.

Je ne sais pas comment, mais ça s’est estompé. Tout est toujours là, je le sens, mais tout est plus flou. Qu’est-ce qui est bien, qu’est-ce qui est mal, aucune idée mais je sais que je cherche quelque chose. C’est encourageant, non ? Chercher quelque chose, c’est vouloir continuer. C’est accepter d’être déçu et de souffrir à nouveau. Je pourrai parler des causes. L’anxiété, qu’elle soit générale, sociale ou traumatique, la confiance en soi, la peur de l’abandon, l’égocentrisme ou le manque d’empathie. Des tonnes de leviers tous plus ou moins importants qui sont toujours là, qui le seront toujours. Simplement j’arrive à les nommer, j’arrive à les contextualiser et surtout j’arrive à les contrôler.

De toute façon je le sais. La nuit quand ça ne va pas, je me rassure en me rappelant que si jamais ça devient trop dur, ce qui m’est un jour apparu comme une solution évidente m’est toujours ouvert. Alors à quoi bon se presser ? Je ne trouverai peut-être jamais ce que je cherche mais quitte à souffrir, autant y mettre du sens.

Pango

L'auteur de pensées